Cette chanson de Kris Kristofferson, sur le thème de "C'est pas moi ; c'est l'autre !", évoque le (ou les) démon(s) qui sommeille(nt) en chacun de nous, et que les psychologues appellent prosaïquement les "pulsions". Le narrateur se place ici dans une position d'observateur, et décrit comment se déroule, sous ses yeux, la scène prévisible de la séduction hypocrite, qui se terminera inexorablement par l'abandon, dès lors que le démon séducteur sera parvenu à ses fins. Il peut paraître un peu "facile" de prendre ainsi de la distance par rapport à soi-même et accuser ce double sournois, cet alter ego égoïste, ce traître intime, des pires vicissitudes. C'est néanmoins un certain progrès en comparaison de l'attitude plus classique (et très largement chantée : Don't think twice etc.) du mâle épris de liberté qui abandonne son amour d'un temps pour reprendre la route, en grand incompris et insatisfait (You just kind'a wasted my precious time...). A ce sujet, connaissez-vous la très belle chanson "Je ne crois pas" que chante formidablement Aznavour ? Beaucoup moins connue que le "Don't think twice" de Bob Dylan, elle n'a rien à lui envier sur le plan musical ou de l'interprétation. Pour en revenir à la souffrance que peut engendrer l'asymétrie des relations amoureuses, le fait est qu'il est possible d'être sincère, mais beaucoup plus difficile d'être lucide, et l'on peut faire souffrir en s'engageant dans une relation alors que l'on n'est pas à même de voir clair dans la complexité des sentiments qui nous animent, obscurcie par le fardeau de notre passé.
Le Démon à Bouche d’Or et Moi
Je suis descendu à l’auberge des chasseurs
Pour y boire une bière ou deux,
Me suis assis auprès d’une jeune fille en fleurs
Aux yeux aussi noirs que les ch’veux.
Tandis que, verre après verre, je cherchais encore
Comment briser la glace, voilà
Que, sortant de l’ombre, le démon à bouche d’or
Dans un sourire me la vola.
Je dis "Hé, petite, c’est le démon ; je vois-tu pas
Qu’il dissimule ses noirs desseins,
Tout au contraire de moi,
Derrière le sourire d’un saint ?
Il n’est bon qu’à provoquer des problèmes
Et faire accuser son prochain,
Et certains jurent qu’il est en moi-même
Ou pensent que nous ne faisons qu’un,
Mais le démon à bouche d’or n’a plus rien à perdre ;
On ne vit qu’une fois ;
Nous tentons note chance, et tout est bon à prendre,
Le démon à bouche d’or et moi.
Comme toutes celles qui se sont couchées à ses côtés,
Elle savait très bien qu’il mentait ;
Quoi que je dise, elle ne m’aurait pas écouté,
Car, quelle que soit sa volonté,
Elle offrirait ses charmes à la noirceur du danger
Pour quelque chose qu’elle ignorait
En ouvrant ses bras au sourire d’un étranger
Qui l’aimerait puis l’abandonnerait.
C’est le démon ; comme tu vois,
Il dissimule ses noirs desseins,
Tout au contraire de moi,
Derrière le sourire d’un saint ?
Il n’est bon qu’à provoquer des problèmes
Et faire accuser son prochain,
Et certains jurent qu’il est en moi-même
Ou pensent que nous ne faisons qu’un,
Mais le démon à bouche d’or n’a plus rien à perdre ;
On ne vit qu’une fois ;
Nous tentons note chance, et tout est bon à prendre,
Ah ha ha ha.
(Traduction – Adaptation : Polyphrène)
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