samedi 14 février 2015

Sing Another Song, Boys

(Let's sing another song, boys, this one has grown old and bitter.)

Ah his fingernails, I see they're broken,
His ships they're all on fire.
The moneylender's lovely little daughter
Ah, she's eaten, she's eaten with desire.
She spies him through the glasses
From the pawnshops of her wicked father.
She hails him with a microphone
That some poor singer, just like me, had to leave her.
She tempts him with a clarinet,
She waves a Nazi dagger.
She finds him lying in a heap;
She wants to be his woman.
He says, "Yes, I might go to sleep
But kindly leave, leave the future,
Leave it open."

He stands where it is steep,
Oh I guess he thinks that he's the very first one,
His hand upon his leather belt now
Like it was the wheel of some big ocean liner.
And she will learn to touch herself so well
As all the sails burn down like paper.
And he has lit the chain
Of his famous cigarillo.
Ah, they'll never, they'll never ever reach the moon,
At least not the one that we're after;
It's floating broken on the open sea, look out there, my friends,
And it carries no survivors.
But lets leave these lovers wondering
Why they cannot have each other,
And let's sing another song, boys,
This one has grown old and bitter.



Si l’on peut légitimement s’interroger sur la signification de cette chanson, les propres commentaires de son auteur, Léonard Cohen, ne font que renforcer la perplexité. Certes, il s’agit des multiples causes et mécanismes qui peuvent conduire à l’inexorable échec de la relation entre un homme et une femme. Ce que chacun voit en l’autre ne serait qu’une projection, et la conquête de l’amour se solderait par une victoire indissociable d’une défaite. Deux êtres poursuivant leur rêve ne pourraient jamais se rejoindre que pour se déchirer sans se comprendre. Leur union ne serait faite que la tentative de se tyranniser mutuellement… On pourrait voir là l’illustration du sentiment d’échec dont fait souvent état Léonard Cohen à propos de sa vie sentimentale (« Never Any Good »). Faute de pouvoir vraiment comprendre ou conjurer cette fatalité, il en vient à proposer de « changer de chanson », mais la nouvelle chanson ne fait que répéter, avec l’énergie du désespoir, des « La la la… » aussi vains que véhéments.
« Léonard Cohen est l’un de ces rares auteurs de chansons dont vous pouvez mâcher les mots pendants des mois et des mois et toujours leur trouver une saveur » écrivait Nick Jaina. Ce texte en est bien l’illustration. Les mots en gardent indéfiniment une étrange saveur, que la vie, un jour ou l’autre, permet d’identifier. Pour autant, Léonard Cohen se défend d’être un pessimiste ou un désespéré. L’obscurité, dans l’univers qu’il décrit, n’est jamais totale, et de la faiblesse-même peut venir le salut : « There is a crack ineverything – That’s how the light gets in ».
 
ALN


Changeons de Chanson, les Gars
(Changeons de chanson, les gars : celle-ci est vieille et avariée)

Les ongles à ses doigts sont brisés, je vois
Le feu brûle tous ses navires
Et l’adorable fille du prêteur à gages
Est dévorée, dévorée par le désir
Elle l’épie par la vitrine
De la boutique de son vilain papa
Elle le hèle avec un micro
Qu’a dû lui laisser un pauvre chanteur comme moi
Elle brandit un poignard nazi
Le tente avec un hautbois
Le trouve recroquevillé
Et elle veut être sa femme
Il dit : « Au lit, je peux aller
Mais, s’il te plait, laisse le futur
Laisse le ouvert »

Il se tient en hauteur
Oh, je présume qu’il se voit comme le tout premier
Et, la main sur sa ceinture de cuir
Comme si c’était la barre d’un grand paquebot d’acier
Elle apprendra bien à se toucher
Tandis que les voiles brûlent comme du papier
Et il allume la chaîne
De ses fameux cigarillos
Ah, mais jamais, jamais ils n’atteindront la lune
Du moins pas celle que vous voudriez
Les débris flottent sur la mer, au large
Ne portant aucun survivant
Mais laissons ces amants se demander
Pourquoi ils ne s’atteignent jamais
Mais changeons de chanson, les gars
Celle-ci est vieille et avariée
La la la…

(Traduction – Adaptation : Polyphrène)


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