dimanche 8 juin 2025

Still Waiting at the Door

 

I’m still waiting at the door
Where your laughter lived before
Every night I whisper low
Come back home, don’t let me go
But silence is all I know

You wore your cap, I fixed your tie
Watched you chase your dreams and fly
I gave you wings
I stayed behind
But now you’re gone and so is time


I’m still waiting at the door
Where your footsteps touch the floor
Even pain begins to fade
But the love it always stays
Still alone still afraid

I don’t need much, just one more day 
To hear you call, to hear you say
Dad, I remember who you are 
But wishes don’t go that far

So, I sing here on this stage
Old and tired full of ache
Not for gold, not for fame
Just to call out your name
Still waiting, still the same


Voici une chanson sortie de nulle part il y a quelques semaines, accompagnée d’une vidéo la présentant comme chantée lors de l’émission de télé-réalité américaine « America’s Got Talent » sur NBC, par un certain Ernesto. Celui-ci explique qu’il était charpentier, qu’il avait construit de ses mains la maison familiale mais que son fils a grandi, sa femme est devenue distante, et tous deux l’ont quitté un jour, sans au-revoir et sans jamais donner de nouvelle. C’est donc avec l’espoir qu’ils l’entendent et reviennent qu’il vient chanter sur la scène de cette émission.
Belle chanson, mélodie addictive, forte émotion… tous les ingrédients sont là !
Mais…
La recherche sur le site de NBC reste infructueuse, et les internautes s’interrogent en vain sur l’auteur et l’origine de cette chanson pour arriver à la conclusion que la vidéo, sinon la chanson elle-même, a très certainement été générée par l’intelligence artificielle (IA). Divers indices plaident en ce sens, notamment les séquences montrant à l’excès l’émotion des membres du jury.
Le chanteur lui-même, qui dit avoir 54 ans, paraît beaucoup plus, mais il dit aussi que, suite au départ de sa femme et son fils, il a perdu sa maison et dormi dans la rue. Ceci peut expliquer cela. De même, les gestes un peu gauches qu’il fait sur scène pourraient traduire l’émotion compréhensible d’un charpentier montant sur les planches (au sens figuré) pour la première fois. Cependant, la voix est belle, parfaitement maîtrisée, et manifestement pas celle d’un chanteur amateur.
Le mystère reste donc complet… pour l’instant. L’IA est-elle bien à l’origine de cette œuvre ? Si oui, quelle IA ? Qui a formulé la requête et en quels termes ? Sans négliger la question de la propriété intellectuelle : à qui reviennent les droits d’auteurs : l’IA, la personne qui a formulé la requête, tous les artistes dont les œuvres ont été utilisées pour nourrir l’IA ?
Quoi qu’il en soit, l’irruption de l’intelligence artificielle dans la création artistique alimente depuis quelque temps les discussions et suscite l’inquiétude légitime des auteurs et des artistes. S’il s’agit là réellement d’une création de l’lA, l’inquiétude semble justifiée.
Les créations de l’IA peuvent obtenir un grand succès (si l’on en juge par la diffusion virale de cette chanson sur les réseaux sociaux), peut-être au détriment de la « vraie » création artistique en particulier si elle est médiocre ou si elle s’écarte des sentiers battus. L’IA se nourrit en effet de l’existant. Elle peut en faire la synthèse, ou même en tirer la quintessence, mais ses algorithmes lui font pondérer plus lourdement les données qui ont du succès (en termes de nombre de consultations, citations, appréciations), faisant ainsi évoluer la production « artistique » vers un dénominateur commun qui ne sera sans doute ni le plus grand ni le plus original. Cette chanson connaît un succès considérable : certaines vidéos cumulent plusieurs millions de vues, les tablatures sont disponibles, et même un karaoké !
Affaire à suivre, donc, sans pour autant bouder cette belle chanson, d’où qu’elle vienne.
NB : La phrase "You wore your cap, I fixed your tie” fait allusion à la cérémonie de “graduation" (remise du diplôme) au "College" (Université) pour laquelle les étudiants revêtent l’accoutrement traditionnel comportant, outre la toge, un chapeau et une cravate spécifiques de l’établissement.

ALN

 

J’attends encore sur le seuil

De mes mains j’ai bâti les murs
De notr’ maison avec amour
Tu m’éclairais
Me motivais
Je n’ai plus qu’un ciel vide pour parler

J’attends encore sur le seuil
De ton rire j’ai fait le deuil
Chaque soir, je dis tout bas
Reviens-moi, ne me laisse pas
Le silence sur moi s’abat

Je t’ai appris à t’habiller
Suivre tes rêves et voler
T’ai protégé
Encouragé
Mais tu es parti, le temps aussi

J’attends encore sur le seuil
Pour qu’à nouveau je t’accueille
Si la douleur s’atténue
L’amour n’a pas disparu
Dans la peur, la solitude

Je ne demande qu’un jour de plus
Pour t’entendre me dire « Salut
Je me souviens de toi, Papa »
Mais le ciel ne m’exauce pas

Je chante sous les projecteurs
Vieux, las, perclus de douleurs
Pas pour l’argent ni la gloire
Juste pour dire mon espoir
Je t’attends, comme avant

(Traduction - Adaptation : Polyphrène)


 

 



jeudi 20 mars 2025

The Last Chance Texaco

A long stretch of headlights bends into i-9
Tiptoe into truck stops
And sleepy diesel eyes
Volcanoes rumble in the taxi
And glow in the dark
Camels in the driver′s seat
A slow, easy mark

But you ran out of gas
Down the road a piece
And then the battery went dead
And now the cable won't reach…


It′s your last chance
To check under the hood
Your last chance
She ain't soundin' too good
Your last chance
To trust the man with the star
You′ve found the last chance Texaco
The last chance!

Well, he tried to be Standard
He tried to be Mobil
You tried living in a world and in a shell
There was this block-busted blonde
He loved her free parts of labor
But she broke down and died
She threw all the rods that he gave her


Oh, but this one ain't fuel-injected
Her plug is disconnected
She gets scared and she stalls
She just needs a man, that′s all

It's her last chance!
Her timing′s all wrong
Her last chance
She can't idle this long!
Her last chance
Turn her over and go!
Pullin′ out of the last chance Texaco
The last chance

 

Cette chanson de Rickie Lee Jones peut paraître déconcertante à la première écoute. Il est vrai que le temps a passé depuis 1979 et si certaines enseignes de station-service sur les routes nous sont encore familières (Shell, Mobil…), le monde a bien changé et les relais routiers ne sont plus ce qu’ils étaient. Cette œuvre est si originale – par son rythme imprévisible, par l’absence assumée de rimes, par une progression d’accords inédite, par la voix dont les modulations reproduisent accélérations, freinages, virages – qu’il faut la réécouter pour entrer dans un univers musical et métaphorique fascinant où la mécanique automobile et sesdéfaillances illustrent les tribulations sentimentales et affectives, la déchéance, l’échec, l’extinction de l’espoir : Un cœur à la dérive, l’espoir d’être (re)cueillie par un homme qui, cependant, ne fait que passer, pour qui ce ne serait qu’une aventure parmi d’autres, et qui hésite devant ce qui lui semble n’être qu’une épave humaine… Si cette chanson ne fut pas le plus grand succès de Rickie Lee Jones, elle est néanmoins très représentative de son art et de sa personnalité, et elle en a repris récemment le titre comme intitulé de son livre de mémoires (Last Chance Texaco – Chronicles of anAmerican Troubadour). 

A Hélène


Dernière Chance Texaco

Une longue file de phares serpente sur la i-9
Il se glisse dans le relais
Les yeux « diesel » mi-clos
Des volcans grondent dans le taxi, luisent, dans le noir
Des Camel sur le siège avant
Une proie facile

Mais tu es en panne sèche
Sur la route – La casse
Et puis la batterie est morte
Le foutu câble est trop court

Ta dernière chance
De voir sous le capot
Ta dernière chance
Elle n’est pas en pleine forme
Ta dernière chance
Te fier à l’homme à l’étoile
C’est ta dernière chance Texaco
Dernière chance !

Bon, il s’est fait Standard
Il s’est fait Mobil
Il s’est essayé au monde
Et sa coquille
Il y a eu cette bombe blonde
Il aimait ses p’tites gâteries mais
Elle a cassé et crevé
Jeté les bielles qu’il lui a filées

Oh, mais celle-ci est sans injection
Et sa prise est débranchée
Elle a la trouille et elle cale
Il lui faut un mec, c’est tout

Sa dernière chance
Retard d’allumage
Dernière chance
Au point-mort si longtemps
Dernière chance
Laisse-la tomber, tire-toi
Laisse passer la dernière chance Texaco
Dernière chance

 

Traduction - Adaptation : Polyphrène (sur une suggestion et avec l'aide de Michaël Midoun)