vendredi 24 octobre 2008

Elle cherche des puces à son chat

Elle cherche des puces à son chat
Qu'elle est belle quand elle fait ça
Quand ses doigts gagnent du terrain
Et qu'elle lui fait ployer les reins
Sur son poil tiède et lumineux
Sa main a des courants fiévreux
Soudain sa prunelle flamboie
Mais alors moi je sers à quoi

Il ne se passe pas une heure
Sans que je lui livre des fleurs
Des flopées de roses pas dégueulasses
De la part de mecs pleins aux as
Bien à l'abri entre ses seins
Elle niche ce greffier malsain
Dans un décolleté jusque-là
Mais alors moi je sers à quoi

Elle cherche des puces à son chat
Sais-elle au moins que je suis là
Je racle ma gorge et tends mes fleurs
Vu que de mon état je suis livreur
Sans même lever l'oeil sur moi
Elle dit salut posez-ça là
De ses pourliches gros comme le bras
Moi j'en veux pas je sers à quoi

Elle cherche des puces à son chat
Au creux de son divan chinois
Du bout de ses doigts si petits
Elle me désigne la sortie
Et toute ma vie chez Florasol
Je serai larbin je ferai le guignol
Marrez-vous quand je vais crever
Y aura pas de fleurs de quoi m'flinguer

Elle cherche des puces à son chat
Qu'elle est belle quand elle fait ça
Elle cherche des puces à son chat
La vie me coule entre les doigts


Changement de registre, ce matin : je me réveille avec ce refrain de Pierre Perret dans la tête ! Une chanson légère... en apparence. Comme souvent, Pierre Perret, avec des mots simples mais choisis, même s'ils sont volontiers empruntés à l'argot, est capable d'exprimer les sentiments les plus délicats, de produire une profonde émotion, avec une incomparable force d'évocation. Au premier degré, l'histoire du livreur de fleurs amoureux est banale, triste, et touchante. Au second degré, elle nous décrits tous, face à nos rêves et nos illusions. La fascination pour l'inaccessible est à la source des passions, pas seulement amoureuses. La conscience de notre humble condition est une blessure que ravivent, trop souvent, les épisodes de la vie. Bien sûr, notre peine est accentuée par le contraste entre ce sentiment de dévalorisation et l'idéalisation de nos rêves, mais c'est avec, parfois, un peu de complaisance que nous contemplons la souffrance qui en résulte. Et pendant ce temps là, comme le chante Pierre Perret,  

"La vie [nous] coule entre les doigts".

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